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jocelyn.

Des vieillards, des enfants, quelques pieuses femmes,
Ceux qui sentent de Dieu plus de soif dans leurs âmes,
D’un cercle rétréci m’entourent à genoux :
Le Dieu des humbles fois descend du ciel sur nous.
Combien la sainte aurore et ses voûtes divines
Entendent de soupirs s’échapper des poitrines,
Et d’aspirations de terre s’élancer !
Et combien il est doux, ô ma sœur, de penser
Que tous ces poids du cœur que cette heure soulève,
Sur ses propres soupirs au ciel on les élève ;
Qu’à chacun à leur place on rapporte un saint don,
Grâce, miséricorde, amour, paix ou pardon ;
Que l’on est l’encensoir où tout cet encens brûle.
Et la corbeille pleine où le pain qui circule,
Symbole familier du céleste aliment,
Va nourrir tout ce peuple avec un pur froment !
Du Maître en peu de mots j’explique la parole :
Ce peuple du sillon aime la parabole,
Poëme évangélique, où chaque vérité
Se fait image et chair pour sa simplicité.
Lorsque j’ai célébré le pieux sacrifice,
J’enseigne les enfants, je me fais leur nourrice ;
Je donne goutte à goutte à leurs lèvres le lait
D’une instruction simple et tendre, et qui leur plaît.
Je rentre ; et, du matin la tâche terminée,
À ma table, de fruits et de lait couronnée,
Je m’assieds un moment, comme le voyageur
Qui s’arrête à moitié du jour et reprend cœur.
Le reste du soleil, dans mes champs je le passe
À ces travaux du corps dont l’esprit se délasse ;
À fendre avec la bêche un sol dur ; à semer
L’orge qu’un court été pressera de germer ;
À faucher mon pré mûr pour ma blonde génisse ;
À délier la gerbe afin qu’elle jaunisse ;