Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 4.djvu/293

Cette page a été validée par deux contributeurs.
292
jocelyn.

Où d’un bras convulsif, au lieu de ces froids marbres,
J’embrassais, en pleurant, les racines des arbres,
Et, me collant au sol comme pour écouter,
Je croyais sur mon cœur sentir Dieu palpiter !
Désert retentissant des bruits de la nature !
Que mon âme, à l’étroit dans cette enceinte obscure,
Pleurant son magnifique et premier horizon,
Brise d’ardents soupirs les murs de sa prison !
Il me semble, ô mon Dieu, que ce toit qui m’écrase
Rend plus lourde la vie et comprime l’extase ;
Que je respirerais plus librement ailleurs,
Que le vent sécherait l’âcreté de mes pleurs,
Et que l’air m’aiderait, comme il aide les aigles,
À m’élever à Dieu, mieux que ces froides règles !


. . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . .



. . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . .


Ces hommes sont heureux cependant sous ces lois ;
Ils suivent sans détours leur route. Ah ! je le crois :
Ils n’ont pas respiré l’air de feu des tempêtes ;
L’ombre de ces arceaux couvrit toujours leurs têtes ;
De Dieu seul, de sa loi, leur souvenir est plein ;
Ils n’ont point à couver un foyer dans leur sein,
À tuer leur pensée, à tromper, à sourire
En cachant dans leur main l’aspic qui la déchire ;
Leur jour n’a pas une ombre et leur cœur pas un pli :
Mais moi, Seigneur, mais moi !… Mon Dieu, l’oubli, l’oubli !