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jocelyn.

Un sein de femme, ô ciel ! sous la sanglante toile !
Ma main recule froide et mon regard se voile !…
Mon front tourne et bourdonne et bat sans sentiment,
Et je ne sais combien dura l’affreux moment.
Cependant le péril me rend à la nature :
Le sang que le froid glace aux bords de la blessure
Rentre dans la poitrine et semble l’étouffer.
Rien là pour l’humecter, rien pour la réchauffer !
Sur ce sein déchiré sans souffle je me penche,
De mes lèvres en feu je l’échauffe et l’étanche :
Il coule… elle revit… voit son sein découvert,
Rougit, ferme son œil, et ne l’a plus rouvert !
De ses sens affaiblis le délire s’empare,
La fièvre ou la douleur dans ses rêves l’égare ;
Elle accuse ou bénit, mord ou baise ma main ;
Puis enfin elle dort !… Oh ! quel réveil demain !