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L’Océan engloutit ces races criminelles,
Leurs projets insensés périrent avec elles,
Et, confiant aux vents la garde de ces mers,
Le silence éternel rentra dans ces déserts !
Fière et libre à présent du vil poids qui l’oppresse,
La nature y triomphe en sa mâle jeunesse ;
Le cèdre monte en paix sur les vallons flétris,
L’océan de ses ports y ronge les débris,
Et la terre, du moins, dans son luxe sauvage,
Au Dieu qui la créa rend un plus digne hommage ! »
Il dit, et sur les flots de nouveau s’élança
Jusqu’aux sommets de l’Inde où son vol s’abaissa,
Sur l’antique Immaüs, dont le front large et sombre
Couvrait aux anciens jours des peuples de son ombre,
Et versait à ses pieds de ses rameaux divers
Sept fleuves dont les flots allaient grossir trois mers !
De là, mon œil, suivant leur onduleuse pente,
Sur les champs de l’Asie avec leurs flots serpente !
Cherche Tyr ou Memphis, ou le tombeau d’Hector,
Salue avec des pleurs l’olivier du Thabor,
Redemande au désert les traces de Palmyre,
Ces jardins suspendus que Babylone admire,
Revoit Jérusalem, ses cyprès, son Jourdain,
Et cette tombe où dort l’espoir du genre humain !
Le silence et le deuil régnaient sur ces collines,
Les fleuves serpentaient à travers des ruines,
Le sable du désert, volant en tourbillons,
Traçait au gré des vents ses livides sillons,
Des peuples disparus effaçait les ouvrages :
Seule, élevant sa tête au-dessus des nuages,
La pyramide assise au milieu de ce deuil,
Des enfants de Memnon magnifique cercueil,
Brise comme un écueil le sable qu’elle arrête !
Et sur les flots mouvants qu’agite la tempête,