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Saluce de *** que son ami est au château d’Urcy, le prient de vouloir bien se rendre à la poste du Pont-de-Pany, où elles l’attendent à l’auberge, n’ayant d’espoir qu’en lui. Leur nom ne lui est peut-être pas inconnu, mais elles sont convaincues que leur qualité d’étrangères et de fugitives suffirait pour leur assurer son intérêt et sa bonté.

« Comtesse Livia D***.
» Et sa fille, princesse Régina C***. »


IV


Je reconnus de suite les deux noms qui remplissaient les lettres de Saluce. Seulement je ne me rendais pas compte de leur arrivée en France, de leur séjour dans une auberge de campagne, sur une route indirecte de Bourgogne, et enfin de ce titre de fugitives qu’elles ajoutaient à leur signature. Mon oncle, que les grelots du cheval du postillon avaient attiré sur le perron du vestibule, souriait d’un air de finesse et de bonté à ma physionomie étonnée et à l’attention avec laquelle je lisais et relisais cette lettre.

« Pas de mystère avec moi, me dit-il en me raillant de l’œil ; les héros de romans ont toujours besoin d’un confident. J’ai connu dans mon temps les deux rôles. Je ne pense pas que ce soit le premier que ces merveilleuses beautés errantes, dont le postillon a parlé en buvant son verre de vin, viennent m’offrir ; mais tu peux me donner le second, je serai discret, c’est la vertu de l’indulgence.

« — Je vous jure, lui dis-je, qu’il n’y a, dans ce message, aucun mystère qui me concerne. Vous me reprochez souvent ma mélancolie et vous en savez la cause. Mon cœur