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précaution et ménagement, et après avoir pris connaissance de celle qui m’était adressée. J’étais seul dans un de ces petits chars suisses que j’avais pris à Nyon. Je lus la mienne sans être distrait. En voici les principaux passages :



DIX-HUITIÈME LETTRE


« Roma, palazzo…


J’ai fait mon devoir, mon ami, mais je sens que je l’ai fait aux dépens de mon existence. N’importe, j’ai fait mon devoir, et je sens ma conscience qui m’approuve au milieu du déchirement de mon cœur. Il y a deux êtres en moi, dont l’un a immolé l’autre. Tout est fini, Régina est libre ; elle peut maintenant revenir à Rome avec sa pauvre comtesse, rentrer dans le palais ou dans les villas de sa grand’mère, voyager ou vivre dans sa patrie sans être jamais ni rappelée, ni contrainte, ni inquiétée dans son indépendance par le prince. Un mot de moi lui a reconquis son nom, sa liberté, sa fortune, sa patrie. Pouvais-je hésiter plus longtemps à dire ce mot ! Je m’en fie à toi. Prononce !… Mais non, ne prononce pas, car ce qui est fait est fait. J’ai prononcé moi-même, et si je me repentais une seule minute de l’arrêt que j’ai porté contre moi-même, je serais le plus lâche et le plus perfide des hommes. Je veux bien