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anges regarderaient celui d’un prophète, il nous prit à part sur le palier de l’escalier, Geneviève et moi, et nous dit avec une expression de doute et d’inquiétude : « C’est une pleurésie et son cinquième jour, le neuvième décidera. Le cas est grave, mais pas désespéré. Les boissons, la sueur et la tranquillité d’âme sont le seul traitement à observer. Je viendrai plusieurs fois tous les jours diriger Geneviève. Elle y peut plus que moi. Je ne suis que l’œil qui voit le mal, elle est la main qui le touche et qui le combat à tous les moments. »

Geneviève retourna à son poste auprès du lit ; l’enfant se mit à nettoyer les outils de son père et à raccommoder le soufflet dans la cour, au pied de l’escalier, allant et venant sans cesse de son ouvrage à Geneviève et de Geneviève à son ouvrage, les pieds nus pour ne point faire de bruit. Je pris une chambre dans l’auberge en face du hangar. Je voyais de ma fenêtre tout le petit tracas que Geneviève et l’enfant faisaient sur l’escalier de l’écurie. Toutes les fois qu’elle sortait pour respirer l’air ou pour aller chercher une chose ou l’autre à la cuisine de l’hôtellerie, la pauvre fille passait la main dans les cheveux blonds de ce bel enfant, les effilait entre ses doigts comme des soies, les regardait reluire au soleil, et lui baisait le front en cachette, croyant que personne ne la voyait.


CXLIII


Trente-six heures se passèrent ainsi sans apporter aucun changement à l’état du malade. Le troisième jour, qui était le neuvième de la maladie, le médecin fit, en s’en allant, un geste de découragement.