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sista. « La mort ne veut pas de moi à cause de mes péchés envers vous, Geneviève, me dit-elle ; j’ai été trop dure dans le temps du mariage ; le bon Dieu me punit. Je vais me retirer chez des parents. »


CXX


« Ce fut à ce moment, monsieur, que le nouveau curé, mon pauvre cher maître, votre ami, fut envoyé dans la paroisse pour remplacer le curé défunt, comme un enfant perdu qu’on envoie à la brèche pour combler le fossé de son corps ou pour tenir le drapeau debout un moment de plus. Aucune servante d’en bas n’avait voulu le suivre : il n’avait point de gages à donner, que la peine de secourir les agonisants et de porter le lait de sa chèvre aux petits orphelins dont l’épidémie avait emporté les mères. Ce pauvre jeune homme, tout humain et tout miséricordieux qu’il était, il ne pouvait pas tout faire ; il n’avait pas les mains adroites et douces pour ces créatures comme une femme accoutumée aux malades et aux enfants. Je lui demandai s’il voulait m’accepter pour servante, connaissant l’endroit et sachant faire un peu de tout. « Nous ne parlerons pas de gages, monsieur le curé, que je lui dis ; vous me nourrirez, vous m’habillerez, j’aurai mes soirées à moi pour tiller du chanvre, filer de la laine ou faire des bas ; ça me suffira. Je n’étais pas si riche quand je suis montée ici ; je puis bien en redescendre pauvre si jamais vous me renvoyez de chez vous. »

« Les gages furent convenus ainsi, et j’entrai dans ma dernière place.