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pour cela de la mère, et qu’elle n’a jamais voulu dire d’où venait l’enfant. — Eh bien donc ! elle a bien fait, disaient les voisines ; ne vouliez-vous pas peut-être qu’elle allât crier sur les toits les secrets et les malheurs des maisons ? »

« Vous jugez si j’avais la petite mort et la sueur froide sur la peau en écoutant ça, cachée dans l’ombre d’une porte, et dans quelle agonie je revins à la maison !


LXX


« J’étais si pâle, si pâle, que Josette s’en aperçut. « Tu as quelque chose, Geneviève ! s’écria-t-elle. Il est arrivé un malheur. Mon pauvre enfant ! je veux le voir ; je veux l’embrasser ! je veux me lever, je veux aller chez la mère Bélan ! Je veux qu’elle me dise ce qu’elle en a fait ! » Elle se levait comme une folle, monsieur, tout en disant cela ; elle mettait sa robe et sa coiffe ; elle allait sortir malgré moi ; elle allait rencontrer la foule qui était encore sur les portes, dans la ruelle de la sage-femme ; son désespoir et ses cris allaient tout trahir ; elle était perdue. Je fus obligée de me jeter devant elle, de lutter de toutes mes pauvres forces avec ma sœur, tout en tremblant de lui faire mal pour la recoucher dans son lit, et de lui tout avouer de ce que je venais d’apprendre.

« — Et l’enfant ! mon enfant ! le fils de mon Septime, qu’en ont-ils fait ? où est-il ? Je veux le ravoir ; je veux l’arracher à ces monstres ! »

« Elle criait comme ça, si haut, monsieur, en se débattant, que j’étais obligée de lui mettre la main sur les lèvres pour qu’on ne l’entendît pas de la rue.