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de la promenade dans les prés, où elle allait avec ses cousines, toute confuse, et elle ne voulait plus sortir de la soirée. Elle me disait en boudant : « Ça m’ennuie. — Et quoi, que je lui disais, Josette ? — Que tout le monde me suit comme si j’étais une bête curieuse, et que tout le monde se retourne en chuchotant quand j’ai passé. »

« Moi, monsieur, ça ne me fâchait pas, et, au fond, j’en tirais vanité. Le bon Dieu m’a bien punie de cette complaisance que je mettais dans cette jolie enfant ! Nous y voilà !


LI


Elle était bien sage et bien modeste cependant. Seulement elle aimait un peu la danse, et, quand ses cousines venaient la chercher les dimanches soir ou les jours de noces dans le voisinage, elle ne se contenait pas de joie. Elle n’y entendait pas de malice ; mais le mouvement, la musique, la chaleur, la valse, le tourbillon, ça l’enivrait. Quand elle revenait de là, à minuit, ramenée à la porte par ses tantes ou par ses cousines, je ne pouvais pas l’endormir, elle valsait encore en rêve à côté de moi. Voilà tout son défaut ; je ne lui en ai jamais connu d’autres. C’était bien innocent, monsieur, n’est-ce pas ? Car, enfin, quand le cœur est vide, les pieds sont légers, et, quand le vent souffle, la poussière s’élève.

« Eh bien ! monsieur, c’est pourtant ce qui l’a perdue !

« — Comment, perdue ? m’écriai-je.

« — Hélas ! oui, vous allez voir ; et moi aussi, » reprit elle.

J’écoutai plus attentivement.