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XXIII


« Toute la semaine se passa ; les jours m’en parurent plus longs que ceux des autres mois. Le samedi arriva, la nuit vint, et il ne vint pas. C’était le lendemain le saint jour de Pâques fleuries ; il n’avait jamais laissé passer cette semaine, les autres années, sans venir à Voiron chercher les cierges d’église, les fleurs de papier pour l’autel, les fichus de printemps, pour la saison. Je ne savais pas ce qui se serait passé de nouveau là-haut. Je vis venir quelques-uns de ses pays que je connaissais au costume. Je les arrêtai sous un prétexte ou sous un autre, je leur demandai : « Cyprien est-il malade ? — Non, qu’ils me dirent ; nous l’avons vu dimanche qui relevait son mur autour de la fontaine du pré. — Est-ce qu’il ne viendra pas à la plaine cette année ? — Nous ne savons pas, » qu’ils me répondirent. Je me couchai bien triste ; je ne dormis pas de la nuit, excepté le matin un moment, et, en me réveillant, je sentis une place mouillée sur mon traversin : j’avais pleuré en rêvant, sans me dire à moi-même pourquoi.


XXIV


« Je rentrais toute pâle et toute brisée de la messe, la petite jouait avec d’autres enfants dans la rue, je venais de serrer mon livre d’Heures dans le tiroir, et je me tenais la tête lourde entre les mains, accoudée sur le comptoir en ne pensant à rien. Un montagnard que je ne connaissais pas