Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 30.djvu/22

Cette page a été validée par deux contributeurs.


XIII


Quoique Clotilde fût plus âgée de quelques mois que Régina, le développement du corps et de l’âme, plus rapide dans les jeunes filles du Midi, toutes couvées qu’elles soient à l’ombre, avait effacé toute distance entre elles. Leurs pensées et leurs sentiments étaient au même niveau que leurs fronts. À peine avaient-elles passé quelques semaines ensemble, que leurs impressions naissantes s’étaient échangées entre elles comme entre deux sœurs qui auraient sucé le même lait au sein de la même mère. Leurs familles, sans être dans des rapports de société habituelle, se connaissaient de noms et se rencontraient dans les mêmes salons de cardinaux ou de princes romains. Quand la mère de Saluce venait visiter Clotilde au parloir, elle demandait à voir aussi Régina. Quand la grand’mère de Régina, la comtesse Livia, venait plus fréquemment encore passer de longues heures avec la supérieure et avec sa petite fille, elle ne manquait jamais de demander la jeune Française. Elles s’habituaient ainsi dedans et dehors à se considérer comme d’une même famille. Leur attachement l’une pour l’autre s’en augmentait. Tout leur paraissait indivisible entre elles, enfance et jeunesse, couvent et monde, éducation et vie.