Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 30.djvu/203

Cette page a été validée par deux contributeurs.

été contractées pendant l’année de l’épidémie et de la disette, pour acheter des médicaments chez les pharmaciens, et du riz et du sucre chez les épiciers de la petite ville voisine, pour les malades. Mais il y avait un inventaire à dresser, des livres à trier, des papiers à parcourir, quelques pauvres meubles et un peu de linge à vendre ou à distribuer, la servante, le chien, l’oiseau à recueillir, la maison enfin, et le jardin à mettre en ordre et en culture, afin que tout présentât un air de décence, de soin et de propreté aux yeux du vicaire qui viendrait occuper sa place, et qu’aucune mauvaise herbe, aucun brin de paille ou aucune plume oubliés par la négligence ne souillassent le nid d’où le cygne des neiges s’était envolé.

Pendant ces journées employées à ces soins pieux pour la mémoire de mon ami, je n’avais d’autre compagnie que Geneviève. Elle allait et venait tout le jour, de la cour au jardin, du puits au bûcher, de la cave au grenier, de la cuisine à la salle, de la niche du chien au pigeonnier, à la cage des poules, des colombes et des oiseaux. Elle prenait la bêche et le râteau dans les carrés du jardin, pour sarcler quelques choux et les laitues, ou pour niveler un peu les allées dont le sable s’était incrusté de mousse verdâtre pendant la maladie de Jocelyn ; elle jetait bientôt ces outils de jardinage pour prendre le balai et pour nettoyer de la moindre poussière les recoins les plus reculés de l’escalier ou des corridors ; puis elle déposait le balai pour prendre la brosse et pour brosser et frotter les meubles et les jambages de pierre des cheminées, jusqu’à ce que le noyer des armoires et l’épiderme ciré des tables de sapin devinssent des miroirs où son bras se réfléchissait ; puis elle laissait encore les meubles et reprenait le fil et l’aiguille pour faire des reprises aux chasubles, aux nappes d’autel, aux petites serviettes fines avec lesquelles le prêtre essuie