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un peu massive sur ses yeux. Elle ne savait évidemment quelle attitude prendre ni par où commencer. Je la rassurai, et je l’aidai par quelques questions pour lui ouvrir la voie de l’entretien qu’elle paraissait à la fois désirer et craindre.


IX


— « Madame… » lui dis-je.

Elle rougit davantage encore.

« Je ne suis pas mariée, Monsieur, me dit-elle ; je suis fille.

« — Eh bien, Mademoiselle, voulez-vous me dire pourquoi vous êtes venue de si loin, et pourquoi vous avez attendu si longtemps notre retour pour m’entretenir ? Est-ce que je puis vous être utile à quelque chose ? Est-ce que vous avez une lettre à me remettre de la part de quelqu’un de votre pays ?

« — Oh ! mon Dieu non, Monsieur, je n’ai rien à vous demander, et je me serais bien gardée de me procurer une lettre des messieurs de mon pays pour vous, ou de laisser connaître seulement que je venais à Marseille pour vous voir. On m’aurait prise pour une vaniteuse qui voulait se rendre plus grande qu’elle n’est en allant s’approcher des hommes qui font du bruit. Oh ! ce n’est pas cela.

« — Eh bien alors, que venez-vous me dire ?

« — Mais rien, Monsieur !

« — Comment, rien ? Mais rien, cela ne vaut pas la peine de perdre deux jours pour venir d’Aix à Marseille, de m’attendre ici jusqu’au coucher du soleil, et de retourner demain d’où vous venez ?