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Quand, fixant sur ses traits sa paupière ravie,
Ce regard suspendit son haleine et sa vie.


Elle était dans cet âge où, prête à se flétrir,
Cette fleur de beauté qu’un printemps fait mûrir
Semble inviter l’amour à cueillir ses délices,
Avant qu’un jour de plus effeuille ses calices :
Âge heureux de la grâce et de la volupté
Qui confond en saison le printemps et l’été !
La jeunesse mêlait sur ses lèvres écloses
Une tendre pâleur à l’éclat de ses roses ;
Ses traits divins dont l’ombre arrêtait le contour,
Ses yeux bleus, ou brillants, ou voilés tour à tour,
L’astre dont le foyer est le cœur d’une femme
Laissait en longs éclairs échapper plus de flamme ;
D’un sein plus arrondi les globes achevés,
D’un souffle plus égal sous leur voile élevés,
Et ses cheveux flottants dont les tresses moins blondes
Jusque sur le gazon glissaient en larges ondes,
Mais dont l’or, brunissant de plus de feux frappés,
Ressemblait aux épis que la faux a coupés :
Tout en elle annonçait ces saisons de tempête,
Ce solstice éclatant où la beauté s’arrête.
Un voile blanc, tissu de ses blanches brebis,
Pressait son sein d’albâtre, et, glissant à longs plis,
Dessinait les contours de sa taille superbe,
Et venait, sur ses pieds, se confondre avec l’herbe !
Aucun vain ornement, aucun luxe emprunté
N’altérait la candeur de sa pure beauté.
Dédaignant d’un faux art les trompeuses merveilles,
L’opale ou le corail n’ornait point ses oreilles ;
Le rubis sur son front ne dardait point ses feux ;
L’or autour de son col n’enlaçait pas ses nœuds,