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Et tu pâlirais devant elle,
Âme à l’espérance infidèle !
Tu démentirais tant de jours,
Tant de nuits, passés à te dire :
« Je vis, je languis, je soupire :
Ah ! mourons pour vivre toujours ! »

Oui, tu meurs ! Déjà ta dépouille
De la terre subit les lois,
Et de la fange qui te souille
Déjà tu ne sens plus le poids.
Sentir ce vil poids, c’était vivre :
Et le moment qui te délivre,
Les hommes l’appellent mourir !
Tel un esclave, libre à peine,
Croit qu’on emporte avec sa chaîne
Ses bras qu’il ne sent plus souffrir.

Ah ! laisse aux sens, à la matière,
Ces illusions du tombeau !
Toi, crois-en à ta vie entière,
À la foi qui fut ton flambeau !
Crois-en à cette soif sublime,
À ce pressentiment intime
Qui se sent survivre après toi !
Meurs, mon âme, avec assurance !
L’amour, la vertu, l’espérance,
En savent plus qu’un jour d’effroi.