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figure, sans avoir alors cette pureté délicate de traits et de lignes qui caractérise la beauté de détail du visage humain, avait l’effet de cette beauté en masse qui fait qu’on s’arrête et qu’on dit : « Voila un noble type de l’humanité, voilà un corps digne de porter une âme et de s’appeler le temple de Dieu. »

Le front n’était pas tout à fait assez relevé pour y laisser jouer les ailes d’une imagination à grand vol ; il était seulement large, droit et accentué comme le front romain dans les bustes de l’époque des Scipions. Le nez était court et d’un seul trait ; la bouche bien ouverte, parée de dents petites, régulièrement enchâssées, intactes et éclatantes jusqu’à sa mort ; les lèvres coupées presque à angle droit, d’une expression d’intrépidité sévère quand elles étaient fermées, d’une grâce et d’une courbe exquise quand elles se desserraient et se plissaient légèrement aux deux coins pour sourire ; le menton relevé par les muscles bien attachés, les joues plus affaissées que pleines, peu de chair, beaucoup de fibres revêtues d’un épiderme coloré par un sang bouillant et généreux, le tour du visage ni ovale ni rond, mais presque carré comme dans les races guerrières du Jura, les yeux d’une couleur changeante et d’un vif éclat, ombragés de sourcils noirs et épais qui tendaient à se rejoindre au-dessus du nez quand il plissait le front, formant alors une seule ligne sombre entre le visage et le front. En somme, une superbe tête de chef militaire modelée par la nature ou par l’habitude pour le commandement.

Cette habitude du commandement militaire se révélait également dans toutes ses attitudes. Il portait la tête haute, il regardait en face, il saluait avec dignité, mais sans hauteur ; ses membres étaient souples, sa