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L’étranger fit ce qui lui était ordonné, heureux de recevoir un pareil dépôt et des instructions si conformes à sa propre inclination.


XVIII


Il y avait au château de ***, comme dans presque toutes les maisons fortes du moyen âge, un passage souterrain qui partait des caves sous la grande tour, qui traversait la terrasse et qui, aboutissant à une poterne, descendait par quatre ou cinq cents marches d’escalier obscur jusqu’au pied du mamelon sur lequel était bâti le château. Là une grille de fer, semblable au soupirail d’un cachot, s’ouvrait dans une fente du roc sur les vastes prairies entourées de bois qui formaient le bassin de la rivière et de la vallée.

L’existence de cette porte, qui ne s’ouvrait jamais, était ignorée des républicains. Les seuls habitants du château savaient où la clef en était déposée, pour des circonstances extrêmes. Le jeune homme s’en saisit, remonta dans la chambre de la jeune fille, l’entraîna tout en larmes à travers ces ténèbres, ouvrit le soupirail, et, se glissant inaperçu de saule en saule dans le lit du torrent, parvint à gagner les bois avec son dépôt.

Une fois dans les sentiers de ces forêts connues, armé de deux fusils, le sien et celui de sa compagne, pourvu d’or et de munitions, il ne craignait plus rien des hommes. Dévoué comme un esclave, attentif comme un père, il conduisit en peu de jours, à travers champs, de bois en bois, et de chemins en chemins, la jeune fille, qui passait pour son jeune frère, jusqu’aux environs de la