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aux yeux du peuple par l’affectation d’une foi dont il ne prenait que l’habit. Il était aisé de voir que l’abbé Dumont était philosophe comme le siècle où il été né. Les mystères du christianisme, qu’il accomplissait par honneur et par conformité avec son état, ne lui semblaient guère qu’un rituel sans conséquence, un code de morale illustré de dogmes symboliques et de pratiques traditionnelles qui n’empiétaient en rien sur son indépendance d’esprit et sur sa raison. C’était la langue du sanctuaire dans laquelle il parlait de Dieu à un peuple enfant, disait-il. Mais, rentré chez lui, il en parlait dans la langue de Platon, de Cicéron et de Rousseau.


XV


Cependant, bien que son esprit fût incrédule, son âme, amollie par l’infortune, était pieuse. Son souverain bonheur eût été de pouvoir donner à cette piété vague la forme et la réalité d’une foi précise. Il s’efforçait de courber son intelligence sous le joug du catholicisme et sous les dogmes de son état. Il lisait avec obstination le Génie du christianisme, par M. de Chateaubriand, les écrits de M. de Bonald, ceux de M. de Lamennais, de M. Frayssinous, du cardinal de Beausset, tous ces oracles plus ou moins éloquents sortis tout à coup, à cette époque, des ruines du christianisme. Mais son esprit sceptique, rebelle à la logique de ces écrivains, admirait leur génie plus qu’il iradoptait leurs dogmes. Il s’attendrissait, il s’exaltait, il priait avec leur style, mais il ne croyait pas avec leur foi.

Quant à moi, plus jeune, plus sensible et plus tendre