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Ses yeux sous le sommeil se ferment à demi ;
Sur son épaule enfin son front penche endormi ;
Oubliant le duvet dont la quenouille est pleine,
Dans la cendre à ses pieds glisse et roule la laine.

LE CHASSEUR.

Que me fait la nourrice aux doigts chargés de jours ?
Astre éclatant des nuits, regarde et dis toujours !

LA LUNE.

Entre l’âtre et le mur, la blanche jeune fille,
Laissant sur ses genoux sa toile et son aiguille,
Sur la table accoudée...

LE CHASSEUR.

_____________Astre indiscret des nuits !
Arrête-toi sur elle ! et regarde, et poursuis !

LA LUNE.

Sur la table de chêne, accoudée et pensive,
Elle suit du regard la forme fugitive
De l’ombre et des lueurs qui flottent sur le mur,
Comme des moucherons sur un ruisseau d’azur.
On dirait que ses yeux fixes sur des mystères
Cherchent un sens caché dans ces vains caractères,
Et qu’elle voit d’avance entrer dans cette tour
L’ombre aux traits indécis de son futur amour.
Non, jamais un amant qu’à sa couche j’enlève,
Dans ses bras assoupis n’enlaça plus beau rêvel
Vois-tu ses noirs cheveux, de ses charmes jaloux,
Rouler comme une nuit jusque sur ses genoux ?

LE CHASSEUR.

Soufflez, brises du ciell ouvrez ce sombre voile !
Nuages de son front, rendez-moi mon étoile !