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Cinq mille suspects furent enlevés de leurs maisons ou de leurs asiles dans le court espace d’une nuit. On en découvrit jusque dans les lits des malades dans les hôpitaux, où ils étaient allés partager la couche des mourants et des morts. La haine des sicaires de Danton fut plus ingénieuse que la peur. On arrêta jusqu’aux trois frères Samson, bourreaux de Paris, coupables d’avoir prêté machinalement leur office aux arrêts de la royauté.

Peu de royalistes échappèrent. Paris fut vidé de tous ceux qui n’avaient pas pu fuir ses murs depuis le 10 août.


II

Le lendemain, au jour, le dépôt de la mairie, les sections, les anciennes prisons de Paris et les couvents, convertis en prisons, regorgeaient de captifs. On les interrogea sommairement. On en relâcha la moitié, victimes de l’erreur, de la précipitation, de la nuit, et réclamés par leurs sections. Le reste fut distribué au hasard dans les prisons de l’abbaye Saint-Germain, de la Conciergerie, du Châtelet, de la Force, du Luxembourg, et dans les anciens monastères des Bernardins, de Saint-Firmin, des Carmes. Bicêtre et la Salpêtrière, ces deux grandes sentines de Paris, serrèrent leurs rangs pour les recevoir.

Les trois jours qui suivirent cette nuit furent employés par les commissaires des sections à faire le triage des prisonniers. Le bruit du sort qu’on leur préparait était semé