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XIV

Barère, né à Tarbes d’une famille respectable, avocat à Toulouse, lettré à Paris, décorant son nom plébéien du nom de Vieuzac, avait apporté du fond de sa province ce nom, ces formes, ce langage, qui ouvraient les salons et qui étaient alors une sorte de candidature naturelle à toutes les fortunes. Madame de Genlis l’avait accueilli et introduit dans la familiarité du duc d’Orléans. Ce prince, pour l’attacher à sa maison, lui avait confié la tutelle d’une jeune Anglaise d’une extrême beauté, qui passait pour sa fille naturelle. Madame de Genlis donnait à cette pupille des soins de mère. Elle se nommait Paméla. Barère était gracieux, éloquent. Sa philosophie sentimentale ressemblait à une parodie de Bernardin de Saint-Pierre. La teinte pastorale des montagnes où il était né se réfléchissait sur ses écrits. Les salons, les théâtres, les académies, affectaient alors cette mollesse ; c’était comme la langueur de l’agonie de cette société mourante. Elle croyait se rajeunir en se puérilisant ; mais c’était la puérilité de la vieillesse. Barère, Robespierre, Couthon, Marat, Saint-Just, toutes ces âmes si âpres avaient commencé par être fades.

Bailly, Mirabeau, le duc d’Orléans, avaient été les patrons de Barère pour le faire nommer à l’Assemblée nationale. Il y avait rempli avec assiduité et talent un rôle plus littéraire que politique ; il avait semé ses nombreux rapports