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de Mirabeau : Ne mettez jamais en balance un homme et la patrie. Je rends hommage aux vertus et au patriotisme de Roland. Mais on n’est pas longtemps libre dans un pays où l’on élève par des flatteries un citoyen au-dessus des autres. — Pour moi, ajoute Cambon, je ne vois qu’en tremblant applaudir un homme. » Danton se leva de nouveau, impatient d’une discussion qui, à elle seule, était un hommage au nom de Roland. « Personne, dit-il avec une feinte déférence, ne rend plus de justice que moi à Roland. Mais si vous lui faites une invitation, faites-la donc aussi à sa femme ; car tout le monde sait que Roland n’était pas seul dans son département. Moi j’étais seul dans le mien. » Des éclats d’un rire malveillant contre madame Roland éclatent à ces mots sur les bancs des Jacobins ; les murmures de la majorité étouffent et reprochent à Danton l’inconvenance de son allusion ; il s’irrite de ces murmures. « Puisqu’on me force à dire tout haut ma pensée, je rappellerai, moi, qu’il y eut un moment où la confiance fut tellement détruite qu’il n’y avait plus de ministres, et que Roland lui-même eut l’idée de sortir de Paris. — J’ai connaissance de ce fait, répond Louvet ; c’est quand on tapissait les rues de placards dégouttant de la plus atroce calomnie. (Voix nombreuses : « C’était Marat ! ») Effrayé pour la chose publique, effrayé pour Roland lui-même, j’allai lui parler de ses périls. Si la mort me menace, me dit-il, je dois l’attendre, ce sera le dernier forfait de la faction. Roland pouvait donc avoir perdu quelque confiance, mais il avait conservé tout son courage. » Valazé soutient Louvet et défend Roland. « On vous a cité Aristide. Si les Athéniens frappèrent d’ostracisme cet homme juste, ils expièrent leur injustice en le rappelant. Si Rome exila Camille, Camille fut vengé par