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obligé de remplacer à cette tribune un homme chargé de décrets de prise de corps qu’il n’a pas purgés ! — Je m’en fais gloire ! s’écria Marat. — Sont-ce les décrets du despotisme ? dit Chabot. — Sont-ce les décrets dont il a été honoré pour avoir terrassé La Fayette ? » dit Tallien. Vergniaud reprit froidement : « C’est le malheur d’être obligé de remplacer à cette tribune un homme contre lequel il a été rendu un décret d’accusation et qui a élevé sa tête audacieuse au-dessus des lois ! un homme enfin tout dégouttant de calomnie, de fiel et de sang !… » Des murmures s’élèvent contre les expressions de Vergniaud. Ducos s’écrie : « Si l’on a fait l’effort d’entendre Marat, je demande qu’on entende Vergniaud. » Les tribunes trépignent et vocifèrent pour Marat ; le président est obligé de rappeler les spectateurs au respect de la représentation. Vergniaud lit la circulaire de la commune aux départements pour provoquer à l’imitation des massacres des prisons. Il rappelle que la commune, par l’organe de Robespierre, a dénoncé un complot tramé, selon lui, par Ducos, Vergniaud, Brissot, Guadet, Lasource, Condorcet, et dont le but était de livrer la France au duc de Brunswick. « Robespierre, reprend-il, sur lequel jusque-là je n’avais prononcé que des paroles d’estime… — Cela est faux ! s’écrie Sergent. — Comme je parle sans amertume, poursuit Vergniaud, je me félicite d’une dénégation qui me prouvera que Robespierre aussi a pu être calomnié. Mais il est certain que dans cet écrit on appelle les poignards sur l’Assemblée. Que dirai-je de l’invitation formelle qu’on y fait au meurtre et à l’assassinat ?… Le bon citoyen jette un voile sur ces désordres partiels. Il cherche à faire disparaître autant qu’il est en lui les taches qui pourraient ternir l’histoire d’une si mémorable Révolution. Mais