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dame Roland, ne se contenta pas pour son parti de ce déni de jugement, de ces lois de mort à deux tranchants et de ces serments équivoques d’unité et d’indivisibilité de la république. « Et qui est-ce qui vous a dit, citoyen Danton, que quelqu’un songeât à rompre cette unité ? répondit-il. N’ai-je pas demandé qu’elle fût consacrée et garantie par une garde composée d’hommes envoyés par tous les départements ? On nous parle de serments ? Je n’y crois plus, aux serments. Les La Fayette, les Lameth, en avaient fait un ; ils l’ont violé ! On nous parle de décret ? Un simple décret ne suffit pas pour assurer l’indivisibilité de la république. Il faut que cette unité existe par le fait. Il faut qu’une force armée envoyée par les quatre-vingt-trois départements environne la Convention. Mais toutes ces idées ont besoin d’être coordonnées. J’en demande le renvoi à la commission des six. »

L’obstination de Buzot ranima l’audace des jeunes Girondins, un moment déconcertée par la voix de Danton. Vergniaud, Guadet, Pétion, se taisaient et semblaient montrer dans leur physionomie et dans leur attitude une répugnance à pousser le combat plus loin. Robespierre, appelé par son nom, monta avec lenteur et solennité les marches de la tribune. Tous les regards se portèrent sur lui. La haine prématurée des Girondins lui avait fait, pour un orateur populaire, le plus beau des rôles : celui de l’innocence qui se défend et de la force qui se modère.