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joignit à eux. Je leur peignis, avec une chaleur dont je ne sais pas me défendre quand il s’agit de ma patrie, mon inquiétude et ma douleur. On criait contre le projet de loi qui demande la punition des provocateurs à l’assassinat. J’ai dit et je dis encore que cette loi ne peut effrayer que ceux qui méditent des crimes et qui les rejettent ensuite sur le peuple, dont ils se disent les seuls amis ! On criait contre la proposition de donner une garde à la Convention. J’ai dit et je redis encore que la Convention nationale ne peut ôter à tous les départements de la république le droit de veiller au dépôt commun et à la liberté de leurs représentants. Ce n’est pas le peuple que je crains, c’est lui qui nous a sauvés ; et, puisqu’il faut enfin parler de soi-même, ce sont les citoyens de Paris qui m’ont sauvé, là, sur la terrasse des Feuillants ; ce sont eux qui détournèrent de moi la mort dont j’étais menacé, qui éloignèrent de mon sein trente coups de sabre ! Non, ce n’est pas le citoyen que je crains, c’est le brigand, c’est l’assassin qui poignarde. S’en étonne-t-on ? J’interpelle à mon tour Merlin. N’est-il pas vrai qu’il m’a averti en confidence, un de ces jours, au comité de surveillance, que je devais être assassiné sur le seuil de ma porte, en rentrant chez moi, ainsi que plusieurs de mes collègues ? Oui, je crains le despotisme de Paris, je crains la domination des intrigants qui l’oppriment sur la Convention nationale ; je ne veux pas que Paris devienne pour l’empire français ce que fut Rome pour l’empire romain. Je hais ces hommes qui, le jour même où se commettaient les massacres, ont osé décerner des mandats d’arrestation contre huit députés. Ils veulent parvenir par l’anarchie à cette domination dont ils ont soif. Je ne désigne personne. Je suis de l’œil le plan des conjurés, je