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III

Mais un coup plus inattendu et plus terrible éclata sur M. de Lessart, le jour même où il se livrait ainsi à ses ennemis. On apprit à Paris la mort inopinée de l’empereur Léopold. Avec la vie de ce prince s’éteignaient les dernières lueurs de la paix : il emportait avec lui sa sagesse. Qui savait quelle politique allait sortir de son cercueil ? L’agitation des esprits jeta la terreur dans l’opinion : cette terreur se changea en haine contre l’infortuné ministre de Louis XVI. Il n’avait su, disait-on, ni profiter des dispositions pacifiques de Léopold, pendant que ce prince vivait, ni prévenir les desseins hostiles de ceux qui lui succédaient dans la direction de l’Allemagne. Tout lui était accusation, même la fatalité et la mort.

Au moment de cette mort, l’Empire était prêt aux hostilités. De Bâle à l’Escaut deux cent mille hommes allaient se trouver en ligne. Le duc de Brunswick, ce héros en espérance de la coalition, était à Berlin, donnant ses derniers conseils au roi de Prusse et recevant les derniers ordres. Bischoffwerder, général et confident du roi de Prusse, arrivait à Vienne pour concerter avec l’empereur le point et l’heure des hostilités. À son arrivée, le prince de Kaunitz éperdu lui apprit la maladie soudaine de l’empereur. Le 27, Léopold était en parfaite santé et donnait audience à l’envoyé turc ; le 28, il est à l’agonie. Ses entrailles se gonflent,