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sentir aux Jacobins, aux Cordeliers, et jusque dans l’Assemblée. Les séances se passaient à voir défiler des députations et à entendre des adresses. Les Marseillais, au nombre de cinq cents, vinrent déclarer par l’organe de leur orateur que le nom de Louis XVI ne leur rappelait que trahison, et demander l’accusation des ministres et la déposition du roi. « Le peuple est levé, s’écria l’orateur des fédérés ; il vous demande une réponse catégorique : pouvez-vous nous sauver ou non ? »

Isnard, dans un discours ardent et incohérent comme les vociférations de la colère, lança au roi l’outrage, l’accusation, l’ignominie et la mort. Pétion, raisonnant froidement sa haine, lut à la barre, avec l’autorité de sa magistrature, l’adresse de la commune de Paris, qui n’était qu’un acte d’accusation contre le roi : « Nous ne vous retracerons pas, disait le maire de Paris, la conduite entière de Louis XVI depuis le commencement de la Révolution, ses projets sanguinaires contre la ville de Paris, sa prédilection pour les nobles et les prêtres, son aversion contre le peuple, l’Assemblée constituante outragée par les valets de la cour, investie par des hommes armés, errante au milieu d’une ville royale, et ne trouvant d’asile que dans un jeu de paume ! Que de raisons n’avions-nous pas de l’écarter du trône, au moment où la nation fut maîtresse d’en disposer ! Nous le lui laissâmes ! Nous ajoutâmes à cette générosité tout ce qui peut relever, fortifier, embellir un trône ! Il a tourné contre la nation tous ces bienfaits, il s’est entouré de nos ennemis, il a chassé les ministres citoyens qui avaient notre confiance, il s’est ligué avec ces émigrés qui méditent la guerre extérieure contre nous, avec ces prêtres qui conspirent au dedans la guerre civile ;