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VIII

La reine nourrissait les mêmes pensées. Une mélancolie abattue, interrompue, seulement par des élans de mâle fierté, avait remplacé sur son visage et dans ses paroles la sérénité de ses heureux jours. « Je commence à voir qu’ils feront le procès du roi, disait-elle à son amie la princesse de Lamballe. Quant à moi, je suis étrangère… ils m’assassineront ! Que deviendront nos pauvres enfants ? » Souvent ses femmes la surprenaient dans les larmes. L’une d’elles ayant voulu lui présenter une potion calmante dans une de ces crises de douleur : « Laissez là, lui répondit la reine, ces médicaments inutiles pour les maux de l’âme ; ils ne me peuvent rien. Les langueurs et les spasmes sont les maladies des femmes heureuses. Depuis mes malheurs je ne sens plus mon corps, je ne sens que ma destinée ; mais ne le dites pas au roi. »


IX

Quelquefois cependant l’espérance prévalait sur l’abattement dans cette âme. Le ressort de la jeunesse et du carac-