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la constitution, chargea ses armes sous les yeux de Pétion. La voix unanime des citoyens accusait le maire de Paris d’avoir eu la volonté du crime sans en avoir montré la franchise. Sergent, qui accompagnait Pétion, fut renversé par un garde national indigné et foulé aux pieds dans la cour des Tuileries. Le directoire de Paris suspendit le maire. On fit des préparatifs de défense autour du château contre un nouveau rassemblement, qu’on annonçait pour le soir. On parla de proclamer la loi martiale, de déployer le drapeau rouge. L’Assemblée s’émut de ces bruits dans la séance du soir. Guadet s’écria qu’on voulait renouveler contre le peuple la sanglante journée du Champ de Mars.

Pétion reparut le soir aux Tuileries, et se présenta devant le roi pour lui rendre compte de l’état de Paris. La reine lui lança un regard de mépris. « Eh bien, monsieur, lui dit le roi, le calme est-il rétabli dans la capitale ? — Sire, répondit Pétion, le peuple vous a fait des représentations, il est tranquille et satisfait. — Avouez, monsieur, que la journée d’hier a été un grand scandale, et que la municipalité n’a pas fait tout ce qu’elle devait faire ! — Sire, la municipalité a fait son devoir. L’opinion publique la jugera. — Dites la nation entière. — Elle ne craint pas le jugement de la nation. — Dans quelle situation est en ce moment Paris ? — Sire, tout est calme. — Cela n’est pas vrai. — Sire !… — Taisez-vous ! — Le magistrat du peuple n’a pas à se taire quand il fait son devoir et qu’il dit la vérité. — C’est bon, retirez-vous ! — Sire, la municipalité connaît ses devoirs ; elle n’attend pas pour les remplir qu’on les lui rappelle. »

Quand Pétion fut sorti, la reine, alarmée des conséquences de ce dialogue si âpre d’un côté, si provoquant de