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son et la princesse de Lamballe, cette amie de ses beaux et de ses mauvais jours, l’environnaient. Belle-fille du duc de Penthièvre et belle-sœur du duc d’Orléans, la princesse de Lamballe avait hérité dans le cœur de la reine de la tendresse exaltée que Marie-Antoinette avait portée longtemps à la comtesse de Polignac. L’amitié de Marie-Antoinette était de l’adoration. Refoulée par la tiédeur du roi, qui n’avait que les vertus, mais aucune des grâces d’un époux ; haïe du peuple, lassée du trône, elle épanchait dans ses prédilections intimes le trop-plein d’un cœur tout à la fois altéré et vide de sentiment. On accusait ce favoritisme. On calomniait tout de la reine, jusqu’à ses amitiés.

La princesse de Lamballe, restée veuve à dix-huit ans, pure de toute ombre sur ses mœurs, au-dessus de toute ambition et de tout intérêt par son rang et par sa fortune, n’aimait dans la reine qu’une amie. Plus l’adversité s’acharnait sur Marie-Antoinette, plus la jeune favorite jouissait d’en prendre sa part. Ce n’étaient pas les grandeurs, c’était le malheur qui l’attirait. Surintendante de sa maison, elle logeait, aux Tuileries, dans un appartement voisin de celui de la reine, pour partager toutes ses larmes et tous ses dangers. Elle était obligée de s’absenter quelquefois pour aller au château de Vernon soigner le vieux duc de Penthièvre. La reine, qui pressentait les orages, lui avait écrit, quelques jours avant le 20 juin, une lettre touchante pour la supplier de ne pas revenir. Cette lettre, retrouvée dans les cheveux de la princesse de Lamballe après son assassinat, et inconnue jusqu’ici, révèle la tendresse de l’une et le dévouement de l’autre.

« Ne revenez pas de Vernon, ma chère Lamballe, avant votre entier rétablissement. Le bon duc de Penthièvre en se-