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Ces paroles, ce mouvement en avant, la sérénité de ce front, ce respect de tant de siècles pour la personne sacrée du roi, suspendent l’impétuosité des premiers agresseurs. Ils semblent hésiter à franchir le seuil qu’ils viennent de forcer. Pendant ce mouvement d’hésitation, le maréchal de Mouchy, Acloque, les trois grenadiers, les deux serviteurs, font reculer le roi de quelques pas et se rangent entre lui et le peuple. Les grenadiers présentent la baïonnette, ils tiennent la foule en respect un instant. Mais le flot de la multitude qui grossit pousse en avant les premiers rangs. Le premier qui s’élance est un homme en haillons, les bras nus, les yeux égarés, l’écume à la bouche. « Où est le Veto ? » dit-il en brandissant vers la poitrine du roi un long bâton armé d’un dard de fer. Un des grenadiers abat du poids de sa baïonnette le bâton et écarte le bras de ce furieux. Le brigand tombe aux pieds du citoyen ; cet acte d’énergie impose à ses camarades. Ils foulent aux pieds l’homme abattu. Les piques, les haches, les couteaux s’abaissent ou s’écartent. La majesté royale reprend un moment son empire. Cette foule se contient d’elle-même à une certaine distance du roi, dans une attitude de curiosité brutale plutôt que de fureur.


XIX

Cependant quelques officiers des gardes nationaux, que le bruit des dangers du roi avait fait accourir, se groupent