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nécessité pour la nation de prévenir les complots d’une cour autrichienne, étaient les textes habituels de ces harangues. Une fois l’agitation communiquée jusqu’à la fièvre, le cri Marchons ! se faisait entendre, et le rassemblement s’ébranlait à la fois dans toutes ces rues. Quelques heures après, les masses d’ouvriers des quartiers Popincourt, des Quinze-Vingts, de la Grève, du port au Blé, du marché Saint-Jean, débouchaient de la rue du Faubourg-Saint-Antoine et couvraient la place de la Bastille. Là le bouillonnement de tous ces affluents d’émeute suspendait un moment ce courant d’hommes. Bientôt l’impulsion reprenait sa force, les colonnes se divisaient instinctivement pour s’engouffrer dans les grandes embouchures de Paris. Les unes s’avançaient par le boulevard, les autres filaient par les quais jusqu’au Pont-Neuf, y rencontraient les rassemblements de la place Maubert, et fondaient ensemble, en se grossissant, sur le Palais-Royal et sur le jardin des Tuileries.

Telle fut la manœuvre commandée pour la nuit du 19 juin aux agitateurs des divers quartiers. Ils se séparèrent avec ce mot d’ordre qui laissait au mouvement du lendemain tout le vague de l’espérance, et qui, sans commander le dernier crime, autorisait les derniers excès : En finir avec le château.