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d’attendrissement pour la reine. Passionné pour la philosophie et pour la liberté, au lieu de les fomenter dans les factions, il les défendait dans la guerre. Il changea le dévouement pour les rois en dévouement à la patrie. Cette noble cause et les tristesses tragiques de la Révolution donnèrent à son caractère une trempe plus mâle, et le firent combattre et mourir avec la conscience d’un héros.

Il était campé avec dix mille hommes à Quiévrain. Il marcha au général autrichien Beaulieu, qui occupait les hauteurs de Mons avec une très-faible armée. Deux régiments de dragons, qui formaient l’avant-garde de Biron, en apercevant les troupes de Beaulieu, sont saisis d’une panique soudaine. Les soldats crient à la trahison. Leurs officiers s’efforcent en vain de les raffermir : ils tournent bride, sèment le désordre et la peur dans les colonnes. L’armée entière se débande et suit machinalement ce courant de la fuite. Biron et ses aides de camp se précipitent au milieu des troupes pour les arrêter et les rallier. On leur passe sur le corps, on leur tire des coups de fusil. Le camp de Quiévrain, la caisse militaire, les équipages de Biron lui-même, sont pillés par les fuyards.

Pendant que cette déroute sans combat humiliait le premier pas de l’armée française à Quiévrain, des assassinats ensanglantaient notre drapeau à Lille. Le général Dillon était sorti de Lille avec trois mille hommes pour marcher sur Tournay. À peu de distance de cette ville, l’ennemi se montre en plaine au nombre de neuf cents hommes. À son seul aspect, la cavalerie française jette le cri de trahison, passe sur le corps de l’infanterie, et fuit jusqu’à Lille sans être poursuivie, abandonnant son artillerie, ses chariots, ses bagages. Dillon, entraîné lui-même par ses escadrons