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X

La Belgique, longtemps dominée par l’Espagne, en a contracté le catholicisme superstitieux et jaloux. La nation appartient aux prêtres ; les priviléges du clergé lui semblent les priviléges du peuple. Joseph II, philosophe avant l’heure, mais philosophe armé, avait voulu émanciper ce peuple du despotisme du sacerdoce. La Belgique s’était insurgée en 1790 contre la liberté qu’on lui apportait, et avait pris parti pour ses oppresseurs. Le fanatisme des prêtres et le fanatisme des priviléges municipaux, réunis en un seul sentiment de résistance à Joseph II, avaient soulevé ces provinces. Les révoltés avaient pris Gand et Bruxelles, et proclamé la déchéance de la maison d’Autriche de la souveraineté des Pays-Bas. À peine triomphante, la révolution belge s’était divisée : le parti sacerdotal et aristocratique demandait une constitution oligarchique ; le parti populaire demandait une démocratie calquée sur la Révolution française. Van der Noot, tribun éloquent et cruel, était l’âme du premier parti. Van der Merch, soldat intrépide, était le chef du parti du peuple. La guerre civile éclata au milieu de la guerre de l’indépendance. Van der Merch, prisonnier des aristocrates et des prêtres, fut plongé dans les cachots. Léopold, successeur de Joseph II, profita de ces déchirements pour reconquérir la Belgique. Lassée de la liberté avant d’en avoir joui, elle se soumit