Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 1.djvu/252

Cette page a été validée par deux contributeurs.
250
MÉDITATIONS

S’éloigne, triste et désolée,
Du séjour qu’elle avait choisi.
Nous n’irons plus dans les prairies,
Au premier rayon du matin,
Égarer, d’un pas incertain,
Nos poétiques rêveries.
Nous ne verrons plus le soleil,
Du haut des cimes d’Italie
Précipitant son char vermeil,
Semblable au père de la vie,
Rendre à la nature assoupie
Le premier éclat du réveil.
Nous ne goûterons plus votre ombre,
Vieux pins, l’honneur de ces forêts ;
Vous n’entendrez plus nos secrets ;
Sous cette grotte humide et sombre
Nous ne chercherons plus le frais ;
Et le soir, au temple rustique,
Quand la cloche mélancolique
Appellera tout le hameau,
Nous n’irons plus, à la prière,
Nous courber sur la simple pierre
Qui couvre un rustique tombeau.
Adieu, vallons ! adieu, bocages !
Lac azuré, roches sauvages,
Bois touffus, tranquille séjour,
Séjour des heureux et des sages,
Je vous ai quittés sans retour !
Déjà ma barque fugitive,
Au souffle des zéphyrs trompeurs,
S’éloigne à regret de la rive
Que m’offraient des dieux protecteurs.
J’affronte de nouveaux orages ;
Sans doute à de nouveaux naufrages