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La même jeune fille était sur le rivage ; mais avec quelle différence de sentiments elle accueillit celui qu’elle croyait perdu sans retour. Saisissant une chaloupe, elle rama elle-même pour aller au-devant de Jacques qui lut, dans ses yeux encore rougis, toute l’anxiété qu’elle avait ressentie au sujet du retard qu’un contretemps lui avait fait subir.

— Que faites-vous ici, seule ? ne put s’empêcher de lui dire avec bonté celui qui avait été la cause de son anxiété ?

— Je ne sais trop, répondit Angéline un peu embarrassée par cette question.

— Je vous demande pardon, dit Jacques, en voyant le trouble que sa question avait créé chez son amie ; mais n’ai-je pas été fidèle à ma parole ? Suis-je si en retard ? Une journée compte peu dans une randonnée comme celle que je viens de faire.

— Pardonnez-moi, Jacques ! ne put que balbutier Angéline, mais j’étais si inquiète ! J’ai craint que vous n’ayez péri ou que vous ne fussiez tombé aux mains de quelque tribu sauvage.

— Jacques sourit tendrement à son amie en constatant quel amour elle nourrissait pour lui. Je vous avoue, ajouta-t-il, que la peur n’est pas ma conseillère habituelle.

— Vous êtes brave, Jacques ! et je suis faible, mais que voulez-vous ? je suis femme.

— Et c’est pour cela que je vous aime, Angéline, et je ne puis refuser l’honneur de prendre place avec une si jolie canotière ; mais souffrez que je prenne les rames pendant que vous causerez avec mon compagnon.

— Vous avez retrouvé les aviateurs ? dit Angéline enthousiasmée.

— Non, mais je ramène quand même quelqu’un à la civilisation.

À ce moment, un homme d’âge moyen, miné par la maladie, sortit de l’hydravion, enleva son casque de cuir et salua respectueusement Angéline.

— Mademoiselle Guillou, permettez que je vous présente Monsieur Antoine Marcheterre, arpenteur au compte du gouvernement de Québec.