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À l’arrivée du cométique de la poste, qui faisait son apparition irrégulièrement tous les quinze jours, une partie de la population du village s’engouffrait dans l’étroit vestibule du bureau de poste, en attendant le déballement du courrier sur lequel on se précipitait avec avidité quand la maîtresse de poste se décidait enfin à distribuer les journaux déjà vieux de quinze jours et les lettres qui, souvent, portaient des marques de l’intempérie dont elles avaient essuyé les morsures au cours du long trajet de la Malbaie à la Rivière-au-Tonnerre, où chevaux et chiens succèdent à la voie ferrée comme moyen de transport.

On commençait à faire des conjectures sur l’arrivée du prochain cométique, tout en lisant en famille les journaux reçus par le dernier courrier.


II


Malgré que l’hiver eût une apparence de forteresse imprenable, le chaud soleil de mars en commença l’attaque avec sa ténacité coutumière qui finit toujours par emporter le morceau. La neige se désagrégea sous les rayons ardents du soleil et le littoral reprit un peu de vie. Bientôt, le bruit grossissant de la chute annonça que la neige fondait aussi à l’intérieur de la forêt.

Les chasseurs blancs sortirent du bois pour venir recommencer la pêche à la morue le plus tôt possible, mais bien décidés à quitter la Côte si les marsouins continuaient leurs ravages.


III


Comme dans tous les romans, après l’hiver ce fut le printemps ; non pas le printemps de nos verdoyantes campagnes où tout renaît dans la nature, où l’oiseau migrateur vient à votre fenêtre annoncer son arrivée par