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les rochers du rivage ! Les maisons peu solides étaient ébranlées par la tempête. Les femmes s’étaient réfugiées à l’église où elles passèrent une partie de la nuit en prières avec le curé, qui les exhortait au courage.

— Notre-Dame de la Garde, priez pour nous !

— Notre-Dame de la Garde, priez pour nous ! entendit-on une partie de la nuit, comme faisant écho aux sublimes invocations des rescapés du petit bateau.

La mère Guillou s’était rendue à l’église avec les autres femmes.

— Je ne puis rester ici à la maison, disait-elle à son mari, quand les autres femmes sont à l’église et que ma fille est en danger et peut-être déjà au fond de la mer.

— Oui, avait répondu le père, va, et prie bien Notre-Dame de la Garde pour qu’elle protège Angéline.

Elle sortit avant les autres de l’église et on la croyait retournée à la maison ; mais elle était restée sur la grève tout le reste de la nuit, essayant de découvrir à travers les éclairs une ombre lui indiquant l’arrivée du bateau de la poste, qui portait sa fille si impatiemment attendue. Son mari qui la croyait à l’église avec les autres femmes veillait au soin des enfants.

En sortant de l’église sur les petites heures, on trouva la mère Guillou inerte et sans connaissance, étendue sur la grève, où les vagues venaient s’abattre à quelques pieds d’elle. Elle fut transportée à la maison après que la garde-malade du dispensaire lui eut administré des stimulants ; mais elle dut s’aliter, ayant épuisé ses nerfs dans cette nuit d’angoisses et d’inquiétudes sans nom.


XIII


Le petit bateau de la poste, avarié mais non désemparé, avait été poussé par la tempête jusque sur la côte de Gaspé, ce qui décida le capitaine à se diriger sur l’Île