Page:Lallier - Angéline Guillou, 1930.djvu/31

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 33 —

— Notre-Dame de la Garde, sauvez-nous ! dit-elle d’une voix forte, dominant tous les bruits. Toute l’assistance de catholiques répondit : Priez pour nous !

Les protestants même, répondirent de leur mieux aux invocations d’Angéline à Notre-Dame de la Garde.

De nouvelles vagues, toujours de plus en plus furieuses, venaient se briser en claquant sur les lianes d’acier du petit navire qui tenait encore tête à la furie des flots.

Tout ce qu’il y avait de chargement sur le pont avait été emporté. Les deux sauvages de Natashquan, cramponnés à un câble d’acier servant à soutenir les mâts, et qui ne voulurent pour rien au monde pénétrer à l’intérieur du navire, étaient les seuls êtres vivants jusque-là restés sur le pont, qui ne furent pas balayés par-dessus bord.

À l’intérieur, Angéline Guillou continuait ses invocations :

— Notre-Dame de la Garde, sauvez-nous !

— Notre-Dame de la Garde, sauvez-nous ! Ayez pitié de nous qui périssons !

Au milieu de cette prière on entendit tout à coup un craquement sinistre, qui fit croire à tous que la fin était arrivée. Le mât principal venait de s’abattre avec fracas au-dessus de la chambre des chaudières, mais comme par miracle il avait épargné le tuyau des bouilloires. La foudre avait coupé net le câble d’acier qui le soutenait.

— Notre-Dame de la Garde ! Oh ! nous laisserez-vous périr, nous qui avons recours à vous, qui n’avez jamais abandonné jusqu’ici ceux qui vous ont invoquée dans le danger ?

Elle acheva cette invocation suprême debout, comme si elle eût voulu se rapprocher de celle dont elle implorait le secours.


X


Le vent, qui jusque-là soufflait en tempête, cessa tout à coup et les vagues s’apaisèrent petit à petit. Le jour commençait à poindre après cette nuit d’agonie. Le capitaine