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quiconque l’a versé[1]. » Saint Cyprien écrivait à un autre de ces féroces proconsuls : « Jamais la cruauté ne s’est exercée contre le nom chrétien que Dieu n’ait fait à l’instant même éclater ses vengeances[2]. » L’histoire nous montre partout cette main divine qui manifeste sa puissance et sa majesté dans la punition des persécuteurs[3].

Un seul manuscrit nous a conservé le Traité de la mort des persécuteurs. Ce précieux monument de la plus glorieuse époque de l’histoire de l’Église, caché depuis longtemps dans la poussière de la bibliothèque de l’abbaye de Moissac, passa dans les mains de Colbert en 1678. Ce grand ministre, à qui les belles-lettres ont tant d’obligation, ne voulût pas qu’on différât à rendre public un trésor inconnu pendant onze siècles.

Baluze, chargé de cette publication, y mit le nom de Lactance en suppléant quelques mots dans le titre. C’est sous ce nom que le Traité de la mort des persécuteurs a paru dans les éditions qu’on en a faites[4].

Nicolas Le Nourry, bénédictin de la congrégation de Saint-Maur, a prétendu que Lactance n’était point l’auteur de ce Traité, et qu’il a été écrit au commencement du quatrième siècle par un nommé Lucius Cecilius[5]. Deux raisons principales déterminèrent Baluze à faire Lactance auteur de ce livre. D’abord saint Jérôme nous apprend que Lactance avait laissé un Traité de la persécution. Ensuite Baluze trouvait entre le style de l’auteur et celui de Lactance la plus grande conformité ; plusieurs expressions employées par l’auteur se rencontrent en effet dans les ouvrages indubitables de Lactance. Malgré toute l’érudition déployée par Le Nourry à l’appui de son opinion, les critiques les plus habiles ont suivi le sentiment de Beluze[6].

  1. Absit utindignè feramus ea nos pati quæ optamus, aut ultionem a nobis aliquam machinemus, quam a Deo expectamus. Tamen, sicut supra diximus, doleamus necesse est, quod nulla civitas impune latura sit sanguinis nostri effusionem. Ad Scapulam, n. 2 et 3, p. 86, edit. Rigaltii an. 1654.
  2. Patientes facit de secutura ultione securitas. Innocentes nocentibus cedunt. Insontes pœnis et cruciatibus acquiescunt ; certi et fidentes quod inultum non remaneat quodcumque perpetimur ; quantoque major fuerit persecutionis injuria, tanto et justior fiat et gravior pro persecutione vindicta. Nec umquam impiorum scelere in nostrum nomen exsurgitur, ut non statim divinitùs vindicta comitetur. Ad Demetrianum, p. 133 edit. Joan. Felli, Amstelod. an. 1700.
  3. On trouve dans les Opuscula selecta SS. Patrum spectantia ad scientiam temporis et disciplinam ecclesiasticam, Gand 1835, tom. III p. 123-241, une continuation du Traité de Lactance ; elle est divisée en deux parties, la première avait paru à Gratz en 1726, la seconde a été rédigée par le savant éditeur de ce recueil, feu M. le chanoine Ryckwaert, président du séminaire de Gand.
  4. Le traité de Lactance parut ainsi pour la première fois dans les Stephani Baluzii Miscellaneorum liber secundus, p. 1-46 et 347-463, Paris 1679.
  5. Lucii Cecilii liber ad Donatum confessorem de mortibus persecutorum, hactenus Lucio Cælio Firmiano Lactantio adscriptus, ad Colbertinum codicem denuo emendatus, accessit dissertatio in qua de hujus libri auctore disputatur, et omnia illius loca dubia, difficilia, obscura, variæque auctoris opiniones examinantur, explicantur, illustrantur. Studio et opera D. Nicolai Le Nourry. Paris 1710, in-8o.
  6. L’opinion de Le Nourry a été vivement attaquée dans des réflexions insérées dans le Journal littéraire, tom. VII p. 1 ;