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est fait mention de plusieurs solennités de Saints. Théodoret en nomme sept ou huit : c’est, disait ce Père aux Grecs de son temps, en leur reprochant le dérèglement de leurs mœurs, qui se faisait voir jusque dans les actions les plus saintes ; c’est par de grands repas que le peuple célèbre la fête des saints martyrs, Pierre, Paul, Thomas, Sergius, Léonce, Antoine, Maurice… On en trouve aussi dans Maxime[1], évêque de Madaure. Gildas le sage, qui dans le cinquième siècle nous a laissé un si triste tableau des désastres de l’Angleterre, marque entre les martyrs anglais, Alban, de Vérolame, Aaron et Julien, tous deux de la ville de Chester. Les calendriers de France, rapportés par saint Grégoire de Tours[2], nous en ont encore fourni quelques-uns. On y peut joindre Timothée et Appollinaire, célèbres à Rheims, et connus par le testament de saint Remy ; Eutrope, premier évêque de Xaintes, que Fortunat chante dans ses vers ; Amarand, révéré par le peuple d’Alby, et avec qui un évêque Eugène partagea la gloire du martyre, durant la persécution d’Hunneric ; Mallosus et Victor, à Cologne ; Antolien, en Auvergne ; Baudil, à Nîmes, et Quentin, dans le Vermandois, dont saint Éloi releva pour la seconde fois les sacrées reliques du lieu qui les couvrait. Grégoire de Tours étend sa recherche jusqu’aux martyrs étrangers : il nomme saint Clément, pape, avec saint Jean et saint Paul ; Sergius, Côme, Damien, Comitius, tous quatre fameux dans l’Orient ; Isidore dans l’île de Chio, et Polieucte, à Constantinople. Je sais que le témoignage de cet historien, souvent trop crédule, n’est pas toujours recevable dans les faits qu’il rapporte et dans le récit des miracles qu’il nous débite avec une bonne foi peu éclairée, surtout ceux qui sont arrivés dans des temps éloignés du sien ; on ne peut toutefois lui refuser créance pour les noms des martyrs dont il nous a donné le catalogue. Mais aussi qu’on n’aille pas s’imaginer que les martyrs de France, qu’il n’y a pas compris, soient pour cela des Saints nouvellement déterrés, puisqu’il s’en faut beaucoup que son catalogue soit exact, et qu’il en nomme plusieurs, dans son histoire, dont il ne parle nullement dans son livre des martyrs, tels que sont Cassius et les autres martyrs d’Auvergne, Crepin et Crepinien, de Soissons ; Caprais, d’Agen… Et ne devons-nous pas à saint Ouen la connaissance de saint Piat de Tournay, de sainte Colombe de Sens, de saint Lucien, de saint Julien et de saint Maximien de Beauvais, lorsque, dans la vie de saint Éloi, il nous apprend que ce saint évêque de Noyon fit des châsses pour les corps de ces saints martyrs ? C’est ainsi que Prudence et le missel Mosarabique nous ont conservé la mémoire de quelques Saints d’Espagne, que Procope nous a fait connaître des Saints de Constantinople, et que d’autres auteurs ont fait passer d’autres Saints jusqu’à nous.


7. réponse a une objection particulière de dodwel.

Je ne vois pas au reste ce que peut prétendre Dodwel, lorsqu’il nous dit que si l’on mettait à part les homélies qui sont certainement des Pères, d’avec celles qui sont supposées, il resterait peu de martyrs dont on célébrât la fète ; je ne vois pas, dis-je, l’avantage qu’il peut tirer de cette proposition, à moins qu’il ne prouve en même temps deux choses : l’une, que nous avons toutes les homélies des Pères sur le sujet des martyrs ; l’autre, qu’il n’y a jamais eu de fête de martyrs, sans qu’elle ait été accompagnée d’une homélie. Certes, avec cet argument Dodwel va d’un seul trait effacer plus de la moitié du calendrier de Buchérius. L’illustre vierge et la généreuse martyre Eugénie était révérée de toute la terre, au siècle et au témoignage de saint Avit, évêque de Vienne : cependant nous ne trouvons aucune homélie prononcée à son honneur ; nous n’en trouvons aucune pour sainte Técle, qui la première parmi les femmes, a levé l’étendard du martyre, ni pour saint Sixte, pape. On n’a pas laissé de mettre dans ce recueil des homélies des Pères, dont on a tiré les noms et les actes de quelques martyrs, et l’on a négligé d’y en mettre d’autres qui ne peuvent tout au plus nous apprendre que leur nom, comme le sermon de saint Chrysostome[3], où il parle de saint Bassus, évêque et martyr, et l’homélie de saint Pierre Chrysologue pour saint Apollinaire, premier évêque de Ravenne. Les autres ouvrages des Pères ne sont pas moins que leurs homélies, remplis de ces sacrés monuments de la gloire des martyrs. Il y en a un dans saint Clément d’Alexandrie, à la gloire de saint Pierre, le prince des apôtres : saint Basile-le-Grand, dans son livre de la divinité du Saint-Esprit, loue saint Athénogène ; saint Grégoire de Nazianze fait l’éloge de saint Oreste, dans une de ses oraisons ; saint Jérôme donne une place honorable parmi les Pères et les martyrs de l’Église à Méthodius, évêque d’Olympe, et ensuite de Tyr, et à Victorin, de Pétave : saint Nil, disciple de saint Chrysostome, a consacré dans

  1. Lib. 8 de curand. Græcor. affection. Epist. inter Augustin. 16.
  2. Lib. de glor. Mar.
  3. Serm. 66, tom. V.