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D. Quel parti donc prendrons-nous ?

G. Choisissons Sévère.

D. Quoi, ce danseur, ce débauché, cet ivrogne, qui fait de la nuit le jour et du jour la nuit ?

G. Il a la confiance des soldats et je l’ai envoyé à Maximien pour qu’il reçoive de lui l’honneur de la pourpre.

D. Je consens à ce que vous proposez ; mais qui choisirez-vous pour second César ?

G. Je choisis celui-ci ; (et il montre un jeune homme demi-barbare, appelé Daïa, auquel il avait donné le nom de Maximin. Dioclétien lui avait en partie changé son nom à lui-même, dans l’espérance qu’il lui serait aussi fidèle que Maximien.)

D. Mais quel est celui que vous me proposez ?

G. C’est mon parent.

D. Gémissant : Vous m’indiquez là des hommes incapables de gouverner l’État.

G. Je me suis assuré de leur capacité.

D. Ceci vous regarde, vous qui allez être à la tête de l’empire. Durant mon règne, je me suis occupé de tout ce qui pouvait contribuer à la félicité des Romains ; s’il arrive quelque malheur à cet empire, ce ne sera pas ma faute.


XIX.

Les choses étant arrangées, on en vint à l’exécution, aux calendes de mai (an 305). Tout le monde jetait les yeux sur Constantin, et personne ne doutait de son élévation. Les soldats, les officiers, invités à cette grande action, ne pensaient qu’à Constantin ; tous les désirs, tous les vœux étaient pour lui. Environ à trois milles de Nicomédie était une éminence, au haut de laquelle Galère avait été honoré de la pourpre, et l’on y avait élevé une colonne avec la statue de Jupiter. Ce fut là que l’on se rendit et que s’assemblèrent les troupes. Dioclétien, les larmes aux yeux, dit aux soldats qu’il est infirme ; qu’après tant de fatigues il a besoin de repos ; qu’il remet l’empire entre des mains plus robustes que les siennes, et qu’il a choisi d’autres Césars. On attendait avec impatience, quand tout-à-coup il nomme Césars, Sévère et Maximien. Chacun reste interdit. Constantin était debout un peu plus haut. On se demande si l’on ne s’est pas trompé de nom. Alors Galère, en présence de l’assemblée, repousse Constantin et fait paraître Daïa, après lui avoir ôté l’habit d’homme privé. On ne peut revenir de son étonnement ; on demande ce que c’est que Daïa. Toutefois personne n’ose réclamer, tant on était étourdi d’un choix auquel on n’avait pas lieu de s’attendre. Dioclétien revêt Daïa de la pourpre