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leurs amis sur le parti qu’il convenait de prendre : car c’était la politique de Dioclétien de faire le bien tout seul, pour en avoir le mérite, et le mal avec conseil, afin de se décharger sur les autres de l’odieux qui en résulterait. Les deux princes consultèrent donc quelques magistrats et quelques militaires. Ceux de la plus haute dignité parlèrent les premiers. Les uns, animés d’une haine particulière contre les chrétiens, furent d’avis d’exterminer ces ennemis des dieux et de la religion dominante. Les autres, quoique d’un avis différent, ayant découvert le sentiment du prince, ne manquèrent pas de l’adopter, soit par crainte, soit par flatterie. Ceci ne fut point encore capable de faire consentir l’empereur à ce qu’on lui proposait. Il voulut consulter les dieux et envoyer un Aruspice à l’oracle d’Apollon Milésien. La réponse de l’oracle fut contraire aux chrétiens. Ainsi l’empereur se crut obligé de céder. Jugeant qu’il ne lui était pas possible de résister à ses amis, au César et à Apollon, il ordonna qu’au moins les choses se passassent sans effusion de sang : car Galère demandait qu’on brûlât vifs ceux qui refuseraient de sacrifier aux idoles.


XII.

On choisit, pour commencer la persécution, un jour propre et de bon augure (an 305)[1]. Ce fut la fête des Terminales, comme si ce jour eût dû servir de terme à la religion chrétienne. C’est l’époque fatale des malheurs qui arrivèrent aux empereurs et à l’univers. Enfin, sous le huitième consulat de Dioclétien et le septième de Maximien Hercule, au point du jour de la fête des Terminales, les soldats avec leurs commandants, les tribuns et les officiers du fisc vinrent à l’église ; puis, après en avoir enfoncé les portes, ils cherchèrent l’idole du dieu[2]. On trouve les saintes Écritures que l’on brûle. Tout est au pillage, les uns volent, les autres s’agitent ; ceux-ci courent çà et là. Dioclétien et Galère considéraient tout ce désordre, car l’église étant sur une éminence, on la voyait du palais. Ils délibérèrent longtemps entre eux s’ils feraient mettre le feu à cet édifice sacré. L’avis de Dioclétien, qui était pour la négative, prévalut ; il craignait que l’embrasement ne se communiquât aux maisons voisines de l’église, et qu’ainsi une grande partie de la ville ne fût brûlée. Les prétoriens accouraient avec des haches et d’autres ferrements, et en peu d’heures le temple, quoique fort haut, fut détruit et rasé jusqu’aux fondements.

  1. le sept avant les calendes de mars (le 23 février.)
  2. Les païens croyaient que les chrétiens avaient des idoles comme eux, et qu’il ne pouvait y avoir de temple sans cela.