minue la surprise, il était fils d’une femme née au delà du Danube, laquelle se sauva dans la nouvelle Dacie, lors de l’irruption des Carpes dans son pays. Sa figure répondait à ses mœurs ; sa taille était gigantesque et son corps d’une grosseur énorme ; son regard, le son de sa voix, ses actions inspiraient la terreur. Il faisait trembler son beau-père même. Voici quelle fut la cause de cette frayeur de Dioclétien.
Narsès, roi de Perse, excité par l’exemple de Sapor, son aïeul, avait levé une armée formidable pour s’emparer de l’Orient. Dioclétien, naturellement timide dans le danger et se rappelant d’ailleurs le malheur de Valérien, n’osa marcher contre un ennemi si puissant. Il lui opposa Galère, qu’il fit passer par l’Arménie. Pour lui, il resta dans l’Orient, où il résolut d’attendre l’événement. Les Barbares tombèrent dans le piége qui leur était tendu. Mais comme c’est leur coutume de marcher tous ensemble et sans ordre, Galère, les trouvant embarrassés par leur multitude et leurs bagages, vint facilement à bout de les vaincre. Narsès se vit obligé de prendre la fuite. Le vainqueur revint chargé de riches dépouilles, ce qui lui inspira de l’orgueil et en même temps de la crainte à Dioclétien. Galère, enflé de cette victoire, commença à dédaigner le nom de César. Ayant reçu des lettres avec cette suscription, il s’écria d’un air furieux et avec un ton de voix épouvantable : TOUJOURS CÉSAR ! [1] Il porta l’insolence au point de vouloir passer pour fils de Mars comme Romulus, et de s’arroger une origine céleste, aux dépens de la réputation de Romula, sa mère. Mais je remets à parler ailleurs des actions de ce prince, pour ne pas confondre les temps. Lorsqu’il eut pris le nom d’empereur et dépouillé son beau-père de l’autorité souveraine, il commença à suivre les accès de sa fureur, qui ne connut plus de bornes. Dioclès (c’était le nom de Dioclétien avant qu’il fût parvenu à l’empire) se servait de tels conseillers et de tels ministres pour bouleverser l’État. Mais quoiqu’il n’y eût point de châtiment que ne méritassent ses crimes, son règne cependant fut heureux tant qu’il ne trempa point ses mains dans le sang des chrétiens. Voici la cause de la persécution qu’il suscita contre eux.
X.
Dioclétien était en Orient. Sa timidité naturelle excitait sa curiosité sur la connaissance de l’avenir. Il faisait des sacrifices et cherchait à se procurer cette connaissance par l’inspection des en-
- ↑ On appelait César l’héritier présomptif de l’empire.