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l’étude, c’est-à-dire à la lecture la plus attentive et la mieux méditée, tous les moments dont il pouvait disposer. Les six heures qu’il passait tous les jours avec ses bêtes, dans un pâturage solitaire, sur la lisière d’une forêt immense, n’étaient pas les moins bien remplies : il ne faisait son métier de vacher qu’entouré de livres ; il les lisait avec une telle ardeur, qu’il oubliait souvent de rentrer à l’ermitage pour le souper et qu’il devait alors se coucher à jeun. Il eut bientôt lu et relu tous les livres que le père Lalure lui avait donnés en prenant congé de lui ; il fut obligé alors, pour fournir des aliments à son insatiable amour de la lecture, de s’adresser à la bibliothèque des Pères ermites. Malheureusement cette bibliothèque, composée d’une centaine de gros volumes de théologie, écrits en latin la plupart, ne lui offrait pas les ressources qu’il eût souhaitées pour travailler seul à son instruction : il y découvrit cependant quatre ou cinq ouvrages français, qui convenaient à ses goûts et à ses aptitudes : l’un sur l’astronomie, l’autre sur la géographie, et les derniers sur la numismatique. Il prit en si grande affection cette dernière science, qu’il en devina les principes et les différents caractères, avant même d’avoir appris le latin. Ce fut un des ermites, auquel il demanda de lui donner les premières notions de la langue latine, et dès qu’il en eut acquis les éléments, presque à lui seul et sans maître, il fit des progrès rapides dans cette langue, qu’il lut bientôt à livre ouvert. Il était moins avancé sous les rapports de l’écriture, faute de bons modèles et de bonne direction ; aussi son écriture, imitée bizarrement des types d’impression qu’il avait sous les