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L’ANGE DE LA CAVERNE

à la bibliothèque. Vous verrez que je ne vous ai pas trompée et que ce n’est pas une sinécure que je vous offre. C’est un vrai pêle-mêle que ma bibliothèque, » ajouta Castello, en riant.

Éliane s’installa donc définitivement dans la caverne, croyant ainsi se rendre au dernier désir de sa mère. Tout alla bien pendant un certain temps. Lucia était toujours présente et, au fond, Éliane était contente de la protection que lui assurait la présence continuelle de cette femme. Car la jeune fille ne fut pas lente à s’apercevoir que Castello était devenu par trop empressée auprès d’elle : chaque jour, c’était des fleurs fraîches cueillies, un livre nouveau ou une bonbonnière que Castello faisait déposer dans la chambre d’Éliane, ou dans la bibliothèque ; de plus, il avait une manière de la regarder qui ne plaisait guère à la jeune fille. Oui, décidément, Lucia était la seule protectrice d’Éliane dans cette grotte, car elle était la seule femme qui y demeurât. Outre Castello, Goliath et Samson, il y avait un chef de cuisine et deux petits marmitons ; c’était là tout le personnel de la caverne.

Éliane avait commencé son travail à la bibliothèque. Ce ne serait pas une sinécure, en effet ; il y avait là de l’ouvrage pour longtemps. Jamais elle n’avait vu un si magnifique assortiment de livres, de bouquins précieux, d’éditions épuisées et qui devaient être hors de prix. Mais, comme l’avait dit Castello, quel pêle-mêle et quel travail à faire avant d’avoir rangé tous ces livres et ces éditions en ordre dans leurs cases ! Certes, ce travail plaisait à la jeune fille, qui avait une véritable passion pour les livres ; ce serait une occupation intéressante, dont elle se réjouissait d’avance.

Il y avait déjà huit jours qu’Éliane était devenue la bibliothécaire de Castello, quand, un soir, après le dîner, celui-ci lui demanda :

« Vous êtes musicienne, sans doute, Mlle Lecour ? »

— « Je ne prétends nullement être musicienne, M. Castello, » répondit Éliane, en souriant. « J’improvise un peu, pour m’amuser ; voilà tout. »