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« Alors, il me raconta qu’il avait mis Imbert en planque (observation), tandis qu’il montait chez son camarade de prison, Chardon, qui faisait beaucoup d’embarras, à propos des sommes tirées aux gens qu’il faisait chanter. C’était une serinette connue sous le nom de la tante Madeleine. En entrant, Gaillard sauta sur lui et le tua net ; il passa dans la seconde pièce et tua également la mère qui dormait. Dans le barbot (la fouille), il n’avait trouvé que quelques pièces de vingt et de quarante francs, et peu de biblots de valeur.

« Quand Gaillard redescendit, Imbert était à la porte, pâle, comme un mort. — Tu es un lâche, un poltron, lui dit-il ; tu ne sauras jamais rien faire. Avec toi on va droit à la butte (guillotine). »

Plus tard nous ferons la part du mensonge et de la vérité dans ce récit de Gaillard, où, maigre les fumées de l’ivresse, il gardait assez de puissance sur sa langue pour ne pas compromettre son vrai complice. La justice eut la preuve positive qu’Imbert, mêlé à ce récit, était un honnête homme ; il n’avait qu’un tort, celui de connaître un assassin.

Lacenaire écouta attentivement et dit :

— Cette historiette est habilement arrangée par vous, Monsieur Canler, mais je connais aussi l’histoire de ce contre-poison des Borgia qui empoisonnait. Pourtant, soyez certain que, si ce que vous me dites-là est vrai, je vous livrerai François pieds et poings liés.

— On est allé avec vous droit au but, lui dit M. Allard ! vous savez d’ailleurs que c’est ma manière, et vous devez connaître mon caractère.