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Il était arrivé à Châlons par le bateau à vapeur et avait retenu sa place pour Beaune. On y arriva à une heure après minuit. Par une négligence qui eût été si préjudiciable aux recherches de la police, le conducteur oubliait d’en avertir Lacenaire qui dormait — il dormait ! — ce fut un voyageur qui, ayant entendu son compagnon de route manifester en partant le désir de s’arrêter à Beaune, — ce fut ce voyageur qui lui rendit le service de le réveiller. — Sans cette circonstance funeste pour lui, on lui faisait dépasser Beaune, il se trouvait à Dijon et se serait bien gardé de revenir sur ses pas, sachant alors que ses faux étaient découverts.

La justice l’attendait par conséquent à Beaune, comptant bien sur la promesse qu’il avait faite à M. Prasson. Tout tournait donc contre lui.

En négociant à ce dernier son mandat (le véritable} sur MM. Delamarre-Martin Didier, souscrit par madame veuve Drevon, Lacenaire devait penser, et pensa en effet, que ce négociant l’enverrait directement à Paris pour l’encaissement ; et comptant rigidement le délai qui s’écoulerait pour la correspondance entre Paris et Beaune, il s’était dit qu’il aurait le temps de négocier encore sa fausse traite de quatre mille francs et de filer… Mais le hasard, ce gendarme de la destinée, le poursuivait encore là. Qu’était-il arrivé ? C’est que M. Prasson, en dépit des usages ordinaires du commerce, au lieu d’envoyer à MM. Delamarre-Martin Didier, ainsi qu’il le devait, la traite à encaisser, avait au contraire expédié à madame Drevon le propre effet dont il était créancier, et, courrier par courrier, cette dame avait répondu à M. Prasson que