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Cette lutte allait bien à ton altier courage
D’affronter l’aventure au port mystérieux,
De voir si l’espérance en nous n’est qu’un mirage,
Ou l’aube dont le jour doit éblouir nos yeux ;

Si la terre et le ciel, les mondes, la nature,
Les astres et les fleurs, si tout cet univers
N’est rien, rien qu’une immense et splendide imposture,
Ou l’Etre irradiant en ses aspects divers.

Atteindre l’Unité dans son essence même,
Y trouver de la vie et l’excuse et le prix ;
Attendre jusque-là pour nier ; — l’anathème
Doit-il donc devancer l’heure où tous est compris ? —

Et librement vouloir, sous sa clarté sereine,
Ce que veut l’infaillible et fixe Volonté ;
Voilà l’œuvre imposée à la pensée humaine,
Voilà sa fin suprême et sa félicité.

L’attente est longue, et longue à franchir est la route.
Pour distraire et tromper les longueurs du chemin,
L’un a l’ambition, le pouvoir qu’on redoute,
Le sceptre sous lequel paît le bétail humain.

L’autre a la gloire et l’or, l’autre a la poésie :
Le rêve ou l’action nous leurre à notre insu.
Tel s’oublie aux divins mensonges d’Aspasie,
Qui gémit au réveil sur l’idéal déçu.